Portraits de seniors. André COURTET, semeur de nature | Lanester

Président de l’association La Clé des Champs — Quartier Kerfréhour — LANESTER

Yeux malicieux et mains en or, André Courtet alias « Dédé » a métamorphosé le quartier de Kerfréhour, voilà 10 ans. Tout est parti d’un triste constat : les seringues dans l’aire de jeux abandonnée. Dédé lance alors les jardins de Kerfréhour, entraînant avec lui une dizaine d’habitants, la mairie et le bailleur social. Ainsi naît l’association la Clé des champs. Depuis, roses, haricots, fèves, oignons, tomates poussent tout comme la joie des habitant.es de partager un petit coin de paradis.

Nom : COURTET
Prénom : André
Âge : 69 ans, je suis du 26 juin 1953
Signes distinctifs : J’ai la main verte ! C’est ce qu’on dit
Engagements et projets : Président de la Clé des Champs pour améliorer la vie des habitant(e)s du quartier avec les jardins de Kerfréhour.

Pouvez-vous nous présenter votre parcours ?

Je suis né dans la terre. Mes parents tenaient une ferme. Dans ma jeunesse, je voulais devenir agriculteur comme eux. Je n’en ai pas fait mon métier, mais une fois à la retraite, dans le quartier de Kerfréhour, j’ai repris cette passion. Je ne suis pas natif d’ici. Avant, j’habitais à Guidel. Mon premier métier, c’était carreleur, puis livreur en pharmacie. Et de là, je suis parti à Keraliguen, une maison de convalescence tenue par des Sœurs, où je m’occupais de l’entretien des parterres et potagers. Ma femme Anne-Marie travaillait aussi à Keraliguen, elle servait les repas et s’occupait du ménage. Nous avons déménagé à cause du travail. Cela fait une vingtaine d’années. En arrivant à Kerfréhour, notre fille Catherine avait 16 ans, elle suivait un apprentissage en peinture. Et Julien, notre fils allait travailler chez Citroën.

« Dans ma jeunesse, je voulais faire agriculteur comme mes parents. Je n’en ai pas fait mon métier, mais une fois à la retraite, dans le quartier de Kerfréhour, j’ai repris cette passion »

Quelle vision avez-vous de votre quartier et de son évolution au cours des années ?

Une chose que j’ai appréciée, en arrivant ici, c’est que l’on s’occupait beaucoup des jeunes. J’ai trouvé cela sympa. On ne voyait pas les enfants traîner n’importe où. La Caf s’occupait d’eux. Ma femme Anne-Marie participait aux animations. C’était l’idéal, j’aimerais que cela continue. Je me souviens des activités sur la Place des rencontres. Il y avait des bals, c’était bien. Je me plais ici. J’ai de très bons souvenirs à la ferme – la maison de quartier – on y organise des repas partagés.

« J’ai dit à la mairie :
Il y a des seringues qui traînent, ce n’est pas normal. J’aimerais bien créer un jardin dans le coin. »

Quand je suis arrivé il y a 20 ans, au milieu du quartier, il y avait une aire de jeux abandonnée. Plein de seringues traînaient là. J’ai commencé à embellir sous les immeubles, petit à petit. Et une fois retraité, je suis intervenu à la mairie et j’ai alerté : « Il y a des seringues qui traînent, ce n’est pas normal. J’aimerais bien créer un jardin dans le coin ». On m’a demandé si j’avais du monde avec moi. Il fallait une dizaine de noms. J’ai répondu : « Vous les aurez ». Alors j’ai pris mon carnet et je l’ai rempli en faisant le tour des gens qui étaient dehors. La mairie s’est organisée avec le bailleur social BSH (Bretagne Sud Habitat). On a créé les jardins fin 2013. Ils ont ôté l’ancienne balançoire, le bitume, et une entreprise a remis de la terre. Et en mars 2014, on travaillait nos parcelles. Le nom de l’association est arrivé bizarrement. Une dame regardait les jardins depuis sa fenêtre et elle a dit : « D’en haut, on dirait une clé ». « Merci », lui ai-je répondu. J’avais trouvé le nom de l’association : la Clé des Champs.

Comment vous situez-vous dans le quartier ?

Les jardins, c’était une idée pour améliorer le quartier, que les gens puissent sortir de chez eux. Qu’ils puissent cultiver un peu de légumes, manger quelque chose de correct. Avoir une vie meilleure dans le quartier. On nous a dit qu’il fallait monter une association. On s’est réuni au bâtiment H. Les femmes turques ont dit : « C’est Monsieur Courtet qui a créé le jardin, c’est lui le président. » C’était la première fois que j’étais dans une association. Je ne pensais pas aller jusque là. Je voulais surtout changer l’image du quartier. La deuxième parcelle a été créée en 2016. Je n’y pensais pas, mais le directeur de BSH m’a conseillé de la prévoir avant la rénovation du quartier. Comme cela, ils étaient obligés d’en tenir compte dans les travaux. Nous avons 50 parcelles aujourd’hui. On a les plus grands jardins de Lanester. Les jardins permettent de bien manger. Je dis aux gens : « Surtout, ne traitez pas vos légumes ». Le quartier vit une grande rénovation urbaine, depuis deux ans. L’entreprise qui s’occupe de la rénovation extérieure travaille avec nous. Une parcelle pour l’épicerie solidaire a été aménagée récemment à la place d’un bâtiment démoli. Le deuxième jardin sera déplacé, mais il sera réparti dans tout Kerfréhour. Autour de tous les bâtiments, il y aura des parcelles. J’ai demandé le principal : avoir de l’eau. Il faudra créer des cuves.

Quel serait votre rêve pour vous et votre quartier ?

« Ici, il y a une vie, une âme. On ne vit pas dans une cité, mais dans un village. »

Avec les jardins, je souhaite que les gens puissent sortir, discuter. Ça fonctionne, car ceux qui n’ont pas de jardins viennent nous voir. Cela fait circuler les gens. On organise aussi une fête des jardins, pour réunir tout le monde, également des barbecues partagés, tous les 15 jours. Cela fait du bien, surtout après les deux ans de Covid. J’aime que les gens se réunissent. Ce que je souhaite aussi, c’est réunir le quartier de Kerfréhour avec l’autre cité à côté, La Châtaigneraie. Réunir tout le monde, c’est cela mon rêve. Dans les jardins, je donne un coup de main à une dame turque qui est trop âgée pour bêcher. On ne parle pas la même langue, mais on communique. Elle nous offre souvent à manger. Un autre rêve, ce serait que la ferme survive à la rénovation urbaine. Tout le monde le dit. Ici, il y a une vie, une âme. On ne vit pas dans une cité, mais dans un village. La preuve : toutes les personnes âgées se réunissent et viennent discuter, au lieu de rester seules dans leur maison. Je suis heureux si les autres sont heureux, c’est mon principe. Tout cela nous a permis de tenir, ma femme et moi, quand nous avons été malades. C’est très important. On est toujours là pour s’occuper des autres. Et aussi de nos petits enfants, tous les mercredis. J’aimerais aussi qu’on fasse quelque chose pour les jeunes. Pas forcément cultiver la terre, mais ce qui leur plait… Il faut les occuper. S’ils s’ennuient, ils font n’importe quoi. Moi, gamin, j’avais du boulot, à la ferme. J’ai eu un stagiaire pendant 15 jours. Il avait l’air content. J’aimerais beaucoup qu’on aide les jeunes à s’épanouir.

Propos recueillis par Marie Fidel

 

 

 

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